La cicatrisation des plaies de taille
La taille, et en particulier la coupe de grosses branches, crée des blessures qui mettent souvent plusieurs années à se refermer. Et tant que la blessure n’est pas refermée, des micro organismes pénètrent dans le bois et causent la pourriture interne. L’art du tailleur consiste à faire en sorte que plaies de taille se referment le plus rapidement et le plus sainement possible.
Le dispositif d'urgence
L’arbre ne dispose pas d’un système immunitaire. Son mode de défense s’appelle compartimentation. Dans la zone adjacente à la blessure de l’écorce se crée un ensemble de barrière destinées à contenir l’invasion par les champignons lignivores.
1 – Une barrière transversale, destinée à empêcher verticalement le passage du champignon. L’arbre obstrue les vaisseaux de sève.
2 – Une barrière frontale, située dans les cernes du bois, qui bloquent la progression du champignon vers le centre. La paroi des cellules s’épaissit
3 – Des barrières latérales, au niveau des rayons médullaires, qui deviennent toxiques pour le mycélium du champignon.
Ainsi les agents responsables de la pourriture sont cantonnés dans une zone réduite, le reste de l’arbre demeure indemne, ce qui lui laisse le temps de refermer sa blessure.
La barrière 4, ou barrière nouvelle
La compartimentation est relativement efficace, mais peut à la longue être franchie. Pour sa sauvegarde, l’arbre fabrique une barrière supplémentaire, qui va isoler le bois présent au moment de la blessure du bois formé après la blessure. Dans le cerne de croissance qui se forme juste après la blessure, des substances inhibitrices puissantes se mettent en place, et forment un « corset » qui sépare le bois présent au moment de la blessure, du bois formé après. Même si tout le bois existant au moment de la blessure est détruit, et que le tronc devient creux, la survie de assurée.
Ne jamais gratter l’intérieur d’un arbre creux « jusqu’au bois sain ». La barrière 4 disparait, et la pourriture pénètre le bois à grande vitesse.
La cicatrisation
La phase suivante est la fabrication d’une nouvelle écorce qui va recouvrir la plaie. Un bourrelet cicatriciel se forme, à partir de la périphérie, et progresse jusqu’à recouvrir progressivement la zone blessée.
La lenteur du recouvrement, qui s’étale sur plusieurs années, justifie la nécessité de la compartimentation qui permet d’attendre que la blessure soit totalement refermée.
La zone de barrage
A l’endroit où la branche est insérée, marquant la limite entre les tissus de la branche et les tissus du tronc, une zone frontière est nettement visible. Elle se compose d’une sorte de bourrelet appellé la » ride de l’écorce » et d’un renflement ,à la base de la branche, le » col «
L’ensemble ride de l’écorce-col de la branche, joue un rôle essentiel dans la défense du bois contre la pourriture. Il constitue une zone de barrage qui est la première ligne de défense contre les champignons. Et c’est à partir de cette zone que le cal cicatriciel se développe le plus activement.
La coupe idéale
Cette zone frontière entre tronc et branche se retrouve au niveau de toutes les intersections de la ramure. A la base de chaque branche, de chaque rameau se trouve une zone de barrage. C’est à ce niveau qu’il faut tailler.
En respectant ce principe simple, couper juste au-delà du col de la branche, et au ras de la ride, on garantit de la meilleure cicatrisation possible.
Nocivité du mastic
Alex Shigo a mis en évidence le mode de réaction des arbres face au blessures. Il a dirigé un grand projet mené par l’USDA Forets aux Etats Unis, chargé entre autres de trouver un mastic « cicatrisant » efficace. Plus de 15 000 arbres blessés ont été traités de façons diverses, puis disséqués sur une période de plusieurs années. Cette étude a démontré inefficacité, voire la nocivité des mastics dits « à cicatriser » caqr ils maintiennent une humidité favorable aux champignons. Shigo et son équipe a également démontré que l’arbre est capable de se défendre lui-même en cas de blessure.